Philippe Kenel


Les Suisses passeront doublement à la caisse

 

Le 30 novembre, le peuple suisse votera sur l’initiative fédérale intitulée «Halte aux privilèges fiscaux des millionnaires (abolition des forfaits fiscaux)». Contrairement à ses apparences et ce qu’essaient de faire croire les initiants, cette initiative a un spectre beaucoup plus large et ne concerne pas uniquement l’imposition d’après la dépense.

 

Le principe général posé par cette initiative est l’interdiction de tous les privilèges fiscaux accordés aux personnes physiques. Son acceptation créerait une totale insécurité juridique. En effet, la notion de « privilège fiscal » est un OJNI (objet juridique non identifié) en droit suisse. Il est cependant loisible de prévoir que cela mettrait fin à toute possibilité de rachat du 2ème pilier et à un très grand nombre de déductions que le citoyen peut inscrire dans sa déclaration d’impôt.

 

En réalité, l’objectif des initiants est non pas de s’attaquer aux privilèges fiscaux, mais aux déductions fiscales. D’ailleurs, Christian Levrat a clairement déclaré dans le discours qu’il a prononcé le 28 juin 2014 au congrès de son parti que le but du PS était la suppression des déductions fiscales. En d’autres termes, en votant oui le 30 novembre, les citoyens suisses ouvriraient non seulement une voie royale pour le parti socialiste dans l’optique des élections fédérales de 2015, mais offriraient un lit constitutionnel dans lequel la gauche n’aurait plus qu’à glisser l’un des fers de lance de son programme.

 

En cas d’acceptation de l’initiative, le citoyen helvétique passerait doublement à la caisse. La première fois en ne pouvant plus opérer les quelques déductions fiscales qu’il peut faire aujourd’hui et, la seconde, en devant compenser le milliard de francs que la Suisse perdrait en cas de départ des forfaitaires.