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Dis fiston, ce sera comment après ?

Mis en ligne le 28.02.2014 à 17:27

Philippe Kenel

- Ben papa, alors là, je crois qu’il faut que l’on s’abonne à L’Hebdo pour les trois prochaines années!

Les règles principales résultant des nouvelles dispositions constitutionnelles (articles 121 a et 197 ch. 9) acceptées par le peuple suisse le 9 février 2014 peuvent être résumées de la manière suivante.

Tout d’abord, il appartient à la Suisse de gérer de manière autonome l’immigration des ressortissants étrangers et, par conséquent, de ne pas conclure d’accords internationaux en la matière limitant sa liberté.

En second lieu, notre pays doit instaurer un système de plafonds et de contingents annuels concernant toutes les autorisations de séjour et de travail délivrées à des ressortissants étrangers, européens ou non. Ce système de contingentement s’applique à toutes les autorisations de séjour et à tous les permis de travail. Ils visent également les requérants d’asile, les frontaliers et les personnes bénéficiant du regroupement familial. Par ailleurs, les plafonds et les contingents relatifs aux permis de travail doivent être fixés en fonction des intérêts économiques globaux de la Suisse et dans le respect du principe de la préférence nationale. Les critères pour délivrer les autorisations de séjour et les permis de travail doivent notamment être le contenu de la demande d’un employeur, la capacité d’intégration de l’intéressé et sa capacité à disposer de revenus suffisants et autonomes.

Enfin, les traités internationaux contraires à ces principes doivent être renégociés et adaptés avant le 9 février 2017. Si avant cette date, les lois nécessaires à la mise en œuvre de ces nouveaux principes ne sont pas entrées en vigueur, il appartiendra au Conseil fédéral d’édicter des règles provisoires par voie d’ordonnance.

Même si ce nouvel article constitutionnel reprend un certain nombre de principes en vigueur avant le 1er juin 2002, date de l’entrée en vigueur de la libre circulation des personnes entre la Suisse et l’Union européenne (voir mon blog du 17 février 2014 Dis papa, c’était comment avant?), il va beaucoup plus loin et est beaucoup plus strict que le droit de l’époque. En effet, sous l’ancien droit, seuls étaient contingentés les permis de travail annuels, certains permis de travail de courte durée et les autorisations de travail saisonnières. Ni les autorisations de séjour, ni les autorisations délivrées dans le cadre du regroupement familial, ni les permis frontaliers, ni les autorisations délivrées à des requérants d’asile n’étaient contingentées.

De fait, la votation du 9 février remet en cause aussi bien la politique migratoire helvétique que les relations bilatérales entre la Suisse et l’Union européenne.

Concernant notre politique migratoire, il nous appartiendra, selon le vœu du peuple helvétique, de limiter le nombre total de ressortissants étrangers, européens ou non, pouvant venir séjourner ou travailler en Suisse. Il est fondamental que le nombre maximum de permis de travail pouvant être délivré chaque année satisfasse les besoins de notre économie. Quant à nos relations avec l’Union européenne, nos autorités sont prises entre le marteau et l’enclume dans la mesure où le système de contingentement est très difficilement réconciliable avec la libre circulation des personnes. Seule une solution négociée nous permettra de respecter la volonté populaire helvétique sans remettre en cause nos relations bilatérales avec l’Union européenne.

Je suis personnellement étonné de constater que nos femmes et nos hommes politiques consacrent plus leur énergie à savoir comment les permis de travail seront répartis entre les différents secteurs de l’économie et entre les cantons qu’à trouver une solution de contingentement acceptable par l’Union européenne. Or, il est nécessaire de trouver une solution avec notre partenaire européen avant de savoir comment nous l’appliquerons sur le plan interne. Il ne sert à rien de mettre au point un système et des clés de répartition au sein de notre pays avant même de savoir si, pour les ressortissants européens, cette solution sera acceptée par l’Union européenne.

Concernant cette question, je pense que notre pays pourrait s’engager à l’égard de l’Union européenne à ce que le nombre de permis disponible pour les ressortissants européens ne soit pas inférieur à la moyenne du nombre de ressortissants européens ayant recours chaque année à la libre circulation des personnes au sein de l’Union européenne. Par exemple, si, par hypothèse, l’Union européenne comptait un million d’habitants et que 20'000 personnes se déplacent chaque année en son sein dans le cadre de la libre circulation des personnes, soit 2% de la population, les contingents helvétiques destinés aux ressortissants européens ne devraient pas être inférieurs au 2% de la population vivant en Suisse.

Ce système aurait le mérite de montrer que la Suisse est prête à faire autant que font les Etats européens tout en respectant la décision populaire du 9 février 2014.

Voilà un système de contingentement potentiellement euro-compatible!


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