Texte plus petit Texte plus grand Imprimer cette page

Suisse-UE : il faut se grouiller!

Mis en ligne le 26.02.2013 à 08:42

Philippe Kenel

Dans deux dossiers clés des relations entre la Suisse et l’UE, le temps joue contre la Suisse. Afin de gagner la partie, le gouvernement helvétique doit faire une offre concrète à la Commission européenne de passer à l’échange automatique d’information, en respectant un délai transitoire raisonnable, voire en instituant un système transitoire du type Rubik, et en demandant, en contrepartie, la garantie d’obtenir le plus rapidement possible la libre circulation des services financiers. En matière d’imposition des entreprises, il est urgent que les cantons décident à l’instar de Genève d’instaurer un taux unique de l’ordre de 13%.

Concernant le passage à l’échange automatique d’information, plus la Suisse attend, moins elle a à offrir en échange, dans la mesure où les banques décident elles-mêmes de ne plus accepter l’argent non déclaré, plus elle court le risque de se voir imposer l’échange automatique d’information non pas par l’UE, mais par l’OCDE ou les Etats-Unis, et plus il est possible qu’elle se retrouve en fin de compte à devoir passer à l’échange automatique d’information avec l’UE sans même recevoir en échange la libre circulation des services financiers. Depuis la fin de l’année 2009, je ne cesse de dire et d’écrire ceci. Attendre est la pire des choses! D’aucuns me rétorquent que, de toute manière, aujourd’hui, la Commission européenne n’octroiera pas à la Suisse la libre circulation des services financiers tant que les questions institutionnelles ne sont pas résolues. Il est vrai que ce risque existe. Néanmoins, je ne suis pas si sûr que la Commission sera aussi catégorique que certains le prétendent si une offre concrète de la Suisse de passer à l’échange automatique d’information se trouve sur la table. De toute manière, je trouve pathétique de voir cet argument brandi par les milieux opposés à ma proposition. En effet, si l’on se retrouve dans cette situation, c’est déjà parce que l’on a trop attendu. En 2010, le problème ne se posait pas en ces termes. Par conséquent, la leçon à tirer est que plus on attend pour offrir le passage à l’échange automatique d’information, moins on obtient en contrepartie.

En matière d’imposition des entreprises, deux calendriers se font concurrence. D’un côté, la Commission européenne a donné un délai à la Suisse au moins de juin 2013 pour faire une proposition. Je suis convaincu que la solution pour notre pays, et les récents travaux du G20 à Moscou l’ont prouvé, n’est pas de créer de nouvelles niches fiscales, mais de passer à un taux identique pour toutes les entreprises, suisses ou étrangères, de l’ordre de 13%. Or, d’un autre côté, il est fort probable que les décisions cantonales de passer à un taux bas unique feront l’objet d’un référendum. Le pire pour la Suisse serait de faire des concessions à l’UE en comptant sur le fait que la Suisse instaurera un taux unique bas et que ce dernier soit refusé dans le cadre de votations populaires. Par conséquent, la Suisse doit trainer les pieds avec l’UE, et les gouvernements cantonaux, notamment vaudois, doivent mettre le turbo. Le problème, est que l’UE est pressée…

Nous avons la Vallée de Joux et les entreprises horlogères, mais les Chinois ont l’art de savoir gérer le temps. Nous devons apprendre d’eux. Accélérer quand il le faut, ralentir quand cela est nécessaire et tout mettre en perspective sur le long terme. Il y a quelques années, un diplomate français a demandé à un représentant du gouvernement chinois ce qu’il pensait de la révolution française de 1789. Celui-ci lui a répondu: «C’est trop tôt pour juger». Apprenons des Chinois, et en l’occurrence, grouillons-nous!


< Retour au sommaire du blog "Kenel de Requin"




René Jost Cher Monsieur,
Vous avez mille fois raison d'insister qu' "attendre st la pire des choses" pour trouver un terrain d'entente avec l'UE. Seulement voilà, le 18 décembre passé j'ai entendu le Secrétaire d'État Yves Rossier qui nous a dit que le Conseil fédéral va jouer les prolongations, en espérant pouvoir garder le statut quo le plus longtemps possible. Dans ce contexte il a évoqué une discussion qu'il a eu il y a quelques années avec un banquier. Celui-ci lui a dit que la place financière était parfaitement consciente que le secret bancaire - ou plutôt celui de la fraude fiscale - ne pourra pas être maintenu, mais qu'on va jouer la prolongation aussi longtemps possible.
En revanche, je ne partage pas votre optimisme au sujet de la disponibilité de la Commission européenne d'accepter de conclure un accord favorable à la place financière, en échange de l'échange automatique des informations, sans que le problème institutionnel soit réglé.
René Jost
26.02.2013 - 11:38

Ajouter un commentaire

Pour commenter les articles de L'Hebdo et des blogs, vous devez être connecté. Créez un compte ou identifiez-vous.
L'Hebdo

Cette semaine
dans l'hebdo

ePAPER


Idées & débats

Courrier des lecteurs



Les rendez-vous du Forum



Nos Hors-séries

Voyages


Prix des lecteurs