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Impôt d’après la dépense : la France doit respecter le droit

Mis en ligne le 15.02.2013 à 16:01

Philippe Kenel

Dans sa chasse aux personnes fortunées, le gouvernement français a franchi la ligne rouge à la fin de l’année 2012 en violant unilatéralement la convention de double imposition liant la France et la Suisse.

Au courant de l’année 1967, les autorités fiscales de nos deux pays avaient trouvé un accord, dans le cadre d’une procédure à l’amiable, prévoyant que seuls les ressortissants français imposés sur la base d’un forfait majoré, soit en pratique 30% de plus que le forfait normal, pouvaient bénéficier de la convention de double imposition. Dans un premier temps en catimini, puis de manière explicite après que le pot aux roses a été dévoilé, les autorités fiscales françaises ont mis fin de manière unilatérale à cet accord. Or, cette manière de faire est une claire violation de la convention de double imposition. En effet, selon l’OCDE « les accords amiables réglant des difficultés générales d’interprétation ou d’application lient les administrations aussi longtemps que les autorités compétentes ne conviennent pas de modifier ou d’abroger l’accord amiable» (Ch. 54 ad art. 25 du Commentaire du Modèle de convention OCDE).

Outre le fait qu’en agissant de la sorte les autorités françaises violent le droit international, elles se tirent, en plus, une balle dans le pied. En effet, elles considèrent à tort que le système du forfait majoré mis en place en 1967 est une faveur faite par la France à la Suisse, alors qu’en réalité il s’agit d’une faveur faite par la Suisse à la France. Par conséquent, en renonçant au système du forfait majoré, les autorités françaises ont l’obligation d’appliquer à la lettre l’article 4 paragraphe 6 lettre b de la Convention de double imposition. Or, contrairement à ce que soutient la France, une étude historique et légale de cette disposition démontre clairement qu’elle n’exclut absolument pas les personnes imposées d’après la dépense du champ de l’application de la convention. La conséquence de la décision des autorités françaises est que même un ressortissant français imposé d’après la dépense en Suisse sans que son forfait soit majoré de 30% peut bénéficier de la convention de double imposition.

Face à cette arrogance française, la Suisse a deux possibilités. Soit elle se montre bon prince, ou plutôt bonne princesse, et accepte de continuer à appliquer le système du forfait majoré résultant de l’accord de 1967. Soit, elle s’enfile dans la brèche ouverte par la France, prend acte de cette dénonciation unilatérale, et considère que tous les français imposés d’après la dépense en Suisse peuvent bénéficier de la convention de double imposition, forfait majoré ou non.

Monsieur le Président Hollande, votre manière de dénoncer unilatéralement en cachette des accords en violant le droit international est illégale et contreproductive. Vous qui détestez les riches, cet épisode franco-suisse est une preuve supplémentaire que la haine d’une classe sociale est mauvaise conseillère !


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